Le site EDA, l’agence
d’information des Missions Etrangères en Asie, évoque une initiative touchante
et originale pour le Jubilé de la Miséricorde, en Corée du Sud.
Une «Porte Sainte» insolite qui rejoint la jeunesse
délaissée de Séoul
«Quittez vos belles et agréables églises et allez à
la rencontre des dangereuses périphéries de l’humanité. Partez à la recherche
des pécheurs, des rejetés, des plus marginalisés de nos sociétés et apportez-leur
la miséricorde de Dieu».
Cet appel du Pape François, le P. Vincenze Bordo,
missionnaire italien OMI (Oblat de Marie Immaculée), en Corée du Sud depuis 26
ans, l’a reçu en plein cœur. En 2015, il décide donc de quitter «son confortable
centre d’accueil pour SDF», qui sert plus de 500 repas chaque jour, à Séoul.
Après avoir acheté un bus, il part avec quelques volontaires, dans les
quartiers les plus malfamés de la périphérie de Séoul, dont celui de la «Dolce
Vita», à la rencontre de ces quelques 250 000 enfants et adolescents qui
vivent dans les rues de la périphérie de Séoul, livrés au trafic et à la
misère, après avoir fui la violence de leur cellule familiale ou de leur foyer.
«Une Porte Sainte» là où la misère abonde
En cette année de la Miséricorde, où chaque diocèse
du monde entier a ouvert une ou plusieurs Portes Saintes afin qu’un grand
nombre de personnes puissent recevoir le pardon et la compassion de Dieu, la
porte automatique du bus AGIT - acronyme coréen qui signifie « Le bus qui prend
soin des jeunes », est devenue «Porte sainte de la miséricorde avec l’accord de
l’archevêque de Séoul», a confié le P. Bordo, à ses confrères
missionnaires.
«Ainsi nos jeunes qui le souhaitent peuvent
franchir la porte de notre bus et recevoir les indulgences jubilaires.
Quiconque franchit cette «Porte Sainte» est
également invitée à pratiquer la miséricorde avec les personnes que nous
rencontrons dans les rues. C’est une porte qui a vocation à rendre saint ceux
qui la franchissent!», se réjouit le P. Bordo.
La rude vie de cette jeunesse abandonnée
Trois fois par semaine, entre 19h et 2h du matin,
le missionnaire et les volontaires AGIT partent à la rencontre de ces jeunes
enfants qui errent dans les rues, afin de leur apporter secours, écoute et
réconfort, en plus d’une aide alimentaire et vestimentaire. La plupart d’entre
eux ont fui la violence domestique ou différentes formes d’abus, et préfèrent
affronter la dureté de la vie dans la rue, plutôt que d’aller dans des centres
d’hébergement.
Pour survivre, ils trouvent un emploi précaire pour
quelques semaines, souvent dans les réseaux des boîtes de nuit, des jeux de
hasard ou de trafic de drogues. Certains d’entre eux finissent souvent entre
les mains des réseaux de prostitution ou de banditisme.
«Mon père a abandonné ma mère, mon frère et moi,
quand j’étais encore très jeune. Comme maman devait travailler pour nous
élever, je passais mes semaines dans un internat. J’y ai vécu jusqu’à l’âge de
16 ans, puis je me suis échappé car la vie était trop rude, parfois j’étais
frappé par des plus grands», confie Lee Hyun,
18 ans, qui, pendant un an, a survécu dans les quartiers malfamés de la
banlieue de Séoul, jusqu’à ce qu’il rencontre ses amis du «bus qui prend
soin des jeunes». «Ils m’ont accueilli, écouté, aidé, puis ensuite j’ai intégré
le foyer pour garçon, où j’ai repris les cours. Cette année, je vais passer un
examen, et ensuite je chercherai un emploi», se réjouit Lee.
Une jeunesse en marche vers l’Espérance ?
Au sein de «la Maison d’Anne», Le P. Bordo a
créé plusieurs structures d’accueil, qui vont du centre d’accueil pour sans-abri
– repas, soins médicaux et soins psychiatriques - aux foyers d’éducation et
d’hébergement pour jeunes, où ils reçoivent également un accompagnement
personnel et spirituel.
«Notre mission s’inscrit dans les pas de Jésus qui
a osé quitter les 99 brebis du troupeau pour aller retrouvé la brebis égarée
dans les dangereux rochers de la montagne», a confié le missionnaire italien. «Ce bus c’est notre jubilé… Il n’est
pas fait de prières récitées dans une agréable église embaumée d’encens, mais
d’un quotidien vécu auprès des plus délaissés, où le travail et les actes de
miséricorde sont posés dans un environnement dangereux et inhumain. N’est-ce
pas l’esprit du Pape François, ce à quoi il nous invite et ce qu’il fait
lui-même lors de ses voyages apostoliques?», interpelle le missionnaire,
avant de conclure : «Le christianisme n’est pas une charmante et belle
morale à pratiquer ou une série de prières à réciter ; c’est une personne
vivante et présente parmi nous: Jésus- Christ, une personne à aimer et à suivre
sur le chemin de l’amour miséricordieux, dans les méandres de nos vie.»