En ce temps de Carême,
temps de conversion et de miséricorde, voici le beau commentaire de saint
Augustin sur l’évangile de la Femme adultère (Jean 8,1-11)
La Loi avait ordonné de
lapider les adultères. Or la Loi ne pouvait prescrire une injustice et si
quelqu'un parlait contre ce que la Loi commandait, il était coupable
d'injustice. Aussi les pharisiens se dirent-ils entre eux à propos de Jésus: «Il
a réputation d'être vrai, il respire la douceur c'est sur la justice qu'il nous
faut l'attaquer. Amenons-lui une femme prise en flagrant délit d'adultère et
disons-lui ce que la Loi ordonne à son sujet.»
Que répond le Seigneur Jésus?
Que répond la Vérité? Que répond la Sagesse? Que répond la Justice elle-même
ainsi mise en cause? Jésus ne dit pas: «Qu'elle ne soit pas lapidée», car il ne
veut pas avoir l'air de parler contre la Loi. Cependant, il se garde bien de
dire: «Qu'elle soit lapidée», car il est venu non pour perdre ce qu'il a
retrouvé, mais pour chercher ce qui est perdu. Alors, que répond-il? Voyez comme
il est rempli de justice, de douceur et de vérité! «Que celui d'entre vous qui
est sans péché, dit-il, lui jette la première pierre». Réponse de sagesse.
Comme il les fait rentrer en eux-mêmes! Leurs manœuvres étaient extérieures,
mais ils ne regardaient pas au fond de leur propre cœur. Ils voyaient
l'adultère, mais ils ne s'observaient pas eux-mêmes. Or quiconque s'observe
attentivement se découvre pécheur. C'est inévitable. Donc, ou bien rendez la
liberté à cette femme, ou bien subissez avec elle le châtiment de la Loi.
Si Jésus avait dit: «Qu'on ne
lapide pas l'adultère», il aurait été convaincu d'injustice. S'il avait dit: «Qu'elle
soit lapidée», il aurait paru manquer de douceur. Il dira donc: «Que celui qui
est sans péché lui jette la première pierre». C'est la voix de la justice. Que
la coupable soit punie, mais non par des coupables que la Loi soit mise à
exécution, mais non par ceux qui violent la Loi. C'est tout à fait la voix de
la justice. Frappés par cette justice comme par un fer de lance, ils rentrèrent
en eux-mêmes et, se découvrant pécheurs, ils se retirèrent l'un après l'autre.
La femme restait donc seule.
Tous étaient partis. Et Jésus leva les yeux sur la femme. Nous avons entendu la
voix de la justice, écoutons celle de la douceur. Je pense en effet que cette
femme devait être bien effrayée par cette parole du Seigneur: «Que celui
d'entre vous qui est sans péché lui jette la première pierre». Ces hommes
étaient rentrés en eux-mêmes, et leur départ était un aveu. Mais ils avaient
laissé la femme avec sa grande faute à celui qui était sans péché. Et comme
elle avait entendu cette parole de Jésus, elle s'attendait à être châtiée par
celui en qui ne se trouvait aucun péché. Mais lui, après avoir repoussé ses
adversaires par la voix de la justice, lève sur elle les yeux de la miséricorde
et lui demande: «Personne ne t'a condamnée? – Personne, répond-elle. – Moi non
plus, dit Jésus, je ne te condamnerai pas». Moi par qui tu croyais être
condamnée parce que tu n'as pas trouvé en moi le péché, moi non plus je ne te
condamnerai pas. Quoi, Seigneur? Tu favorises le péché? Certes non. Écoute ce
qui suit: «Va, et désormais ne pèche plus». Le Seigneur a porté condamnation,
lui aussi, mais contre le péché, et non pas contre l'homme.
Homélies sur l’évangile de Jean, 33, 4-6.
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