vendredi 31 mai 2013

"Maintenant, je vois!"


En écoutant l’évangile de l’aveugle Bartimée (Mc 10, 46-52), je me sens, comme cet homme, poussé à crier vers Jésus: « Seigneur, que je voie ! ». Mais de quelle vision s’agit-il ? Grâce à mes lunettes, je peux voir correctement, de près comme de loin. Mais n’ai-je pas besoin de « lunettes spirituelles » qui me permettent de discerner la beauté du mystère que mes yeux de chair ne peuvent que pressentir ?
Ces questions ont évoqué en moi le souvenir d’un passage du Grillon du foyer, un des splendides Contes de Noël de Charles Dickens.
Caleb est veuf et vit avec sa fille Berthe, qui est aveugle de naissance. C’est un pauvre ouvrier, que son patron exploite sans scrupule. Par amour pour sa fille, Caleb enjolive la réalité lorsqu’il la décrit à la jeune aveugle. Ainsi, sa misérable maison devient, à travers ses paroles, une jolie demeure simple mais confortable ; Caleb lui-même ne lui apparaît-il pas comme un homme plein d’allant, vigoureux et toujours joyeux, alors qu’il est, en fait, usé prématurément, épuisé et en proie à de fréquents découragements ? Le patron sans cœur lui-même bénéficie d’un portrait flatteur. Ainsi, des années durant, Berthe a l’illusion de vivre dans un environnement paisible et avenant. Mais un jour, à la suite d’un événement particulier, Caleb comprend qu’il doit dire la vérité à sa fille. Celle-ci est d’abord bouleversée et fond en larmes. Mais bientôt, elle comprend que cette tromperie n’avait d’autre motif que son bonheur, et que l’amour que lui voue son père est encore bien plus grand que ce qu’elle avait perçu jusque-là. Celle dont les yeux de chair sont définitivement opaques s’écrie alors : « Maintenant, je vois ! »
Alors, Seigneur, que je voie cette bonté dont tu nous entoures, cet amour si plein de respect dont tu nous témoignes, cette beauté du Royaume que tu nous prépares… Que je puisse dire, moi aussi : « Maintenant, je vois ! »


dimanche 19 mai 2013

Il y a 35 ans, Bonne Nouvelle


En septembre 1978, paraissait le premier numéro de Bonne Nouvelle. La revue prenait le relais de Magnificat, publiée pendant près de cinq ans par les pionniers du Renouveau charismatique en Belgique, sous la houlette du cardinal Suenens.
Au sommaire de ce premier numéro, on trouvait les noms du cardinal Suenens, du P. Philippe Verhaegen, de Michael Scanlan, etc. On pouvait également lire un très intéressant article du P. Paul Lebeau – qui fut conseiller théologique de Bonne Nouvelle pendant une vingtaine d’années et qui est décédé l’an dernier – sur « La signification charismatique de la papauté ». En voici quelques extraits.

« Beaucoup de chrétiens, catholiques ou non, se représentent encore l’Eglise catholique comme une sorte d’immense diocèse dont le pape serait l’évêque suprême, les autres évêques n’exerçant, par délégation du pape, qu’une autorité limitée à une portion de ce vaste ensemble. L’expression : ‘L’Eglise catholique romaine’ suggère assez naturellement une telle image. 
« Il faut le dire clairement : cette image est fausse. Et elle est incompatible avec l’enseignement de Vatican II sur l’Eglise.
« En réalité, le pape n’est pape que parce qu’il est élu évêque de Rome (…) Et, parmi les autres Eglises locales, l’Eglise de Rome a une signification particulière, qui est d’ordre charismatique. (…) Quel est donc le charisme propre de l’Eglise de Rome, qui s’exprime et se concentre en la personne de son évêque ?
« C’est le charisme de la foi (cf. 1 Co 12,9), celui d’une confession de foi authentique, suscitée par l’Esprit Saint en vue d’être un signe de ralliement pour la profession de foi de toutes les autres Eglises et même de chaque chrétien. Le fondement historique et spirituel de l’Eglise de Rome, c’est, en effet, la ‘confession’ de Pierre, que commémore, au cœur de la basilique vaticane, et sur le lieu même du martyre de l’apôtre, l’autel ‘de la confession’. (…) ‘Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant !’ (…)
« Ainsi que saint Paul l’a souligné (1 Co 14), le propre de tout charisme authentique, c’est d’‘édifier’ l’Eglise. Telle est bien la signification que le Christ lui-même reconnaît à cette confession de Pierre : ‘Et moi, je te le déclare : tu es Pierre (litt. ‘rocher’) et sur cette pierre j’édifierai mon Eglise’ (…)
« Cette capacité charismatique d’exprimer la foi pascale de l’Eglise tout entière, elle devait se transmettre à l’évêque de l’Eglise locale issue de la suprême confession [le martyre] de Pierre : à l’évêque de Rome ».



vendredi 17 mai 2013

Le témoin privilégié

En Saint-Jean, dans le discours après la Cène, Jésus parle à maintes reprises de l'Esprit Saint. Il dit entre autres qu'il rendra lui-même témoignage de lui (Jn 15, 26). Puis il ajoute: "et à votre tour, vous me rendrez témoignage" (27). Jésus fait donc de l'Esprit son "témoin privilégié".

Qu'est-ce qu'un témoin, sinon une tierce personne qui a assisté à ce dont elle témoigne? Lors d'un accident de roulage, par exemple, le témoin est cette personne qui, sans être directement concernée, a vu et peut parler, peut raconter. C'est le cas de l'Esprit Saint. Il a vu, et il parle, il raconte, il témoigne de ce qu'il a vu et entendu. N'est-il pas étonnant de parler ainsi de Dieu, en Dieu? Dans la première lettre aux Corinthiens, saint Paul questionne: "qui parmi les hommes connaît ce qui est en l'homme, sinon l'esprit qui est en lui? De même, ce qui est en Dieu, personne ne le connaît sinon l'Esprit de Dieu" (1Co 2, 11). Et non seulement, l'Esprit connaît la pensée de Dieu, mais il la connaît dans le don d'amour que Jésus fait de lui-même. Il était là, à la croix, à la résurrection et il témoigne.

D'ailleurs... comment connaissons-nous l'amour de Dieu? Comment, en regardant la croix et l'homme qui y est pendu, comment connaissons-nous et reconnaissons-nous l'amour de Dieu, sinon parce qu'on nous l'a dit, on nous en a convaincu. "Pour nous, dit saint Paul, nous n'avons pas reçu l'esprit du monde, mais l'Esprit qui vient de Dieu" (1 Co 2,12). L'Esprit nous a révélé la profondeur indicible du mystère de l'amour, caché, voilé, mais révélé au coeur de l'homme.

vendredi 10 mai 2013

Notre son de cloche… «Un homme nommé Jésus»



Cette émission, diffusée sur France 2, le mardi 7 mai à 20 h 45, ambitionnait de «mettre en lumière le parcours de» Jésus.
Sur un ton un peu sensationnaliste – sans doute nécessaire pour capter l’attention de téléspectateurs blasés et saturés d’images – la vie de Jésus, de sa naissance à sa mort, est évoquée, commentée, décryptée.
Les images sont puisées dans le Jésus de Nazareth de Franco Zefirelli (1977), mais aussi dans La dernière tentation du Christ (1988) que Martin Scorsese a tiré du roman de Kazantzakis. C’est que le réalisateur de l’émission veut présenter aussi des points de vue non «orthodoxes».
Au rythme des images, des spécialistes (historiens, biblistes, archéologues…) donnent leur point de vue sur les événements, hypothèses et controverses qui émaillent l’histoire de Jésus.
Le tout laisse un arrière-goût frustrant. Pouvait-on mettre sur le même pied les propos prudents et mesurés de biblistes reconnus comme Michel Quesnel, ancien recteur de l’Institut catholique de Lyon, ou Daniel Marguerat, ancien doyen de la faculté de théologie de Lausanne, avec ceux de francs-tireurs, spécialistes autoproclamés, comme Michel Benoît?
Finalement, au-delà des maigres données de la science historique et de l’archéologie, c’est la cohérence et la puissance du message transmis par les évangiles qui, depuis des siècles, anime témoins et martyrs et emporte la foi des croyants, qu’ils soient savants ou cœurs d’enfants. Oui, «nul n’a jamais parlé comme cet homme», c’est lui, le Fils de Dieu.

mercredi 8 mai 2013

Actualité: l'euthanasie





Lundi matin, journal radio de 6h: annonce de la mort du prix Nobel Christian de Duve et des conditions dans lesquelles cela s'est effectué. Je ne veux ici poser aucun jugement. Je veux tout simplement exprimer quelques réflexions et questions qui viennent sans doute aussi à l'esprit de beaucoup d'entre nous:
Je reste désarçonné par le choix, par le geste, et par la manière dont ce geste est posé. On me dira: "mais c'est parce que tu n'es pas habitué; un jour ce sera passé dans les moeurs". Il faudrait ne jamais être habitué par l'euthanasie, ni par une quelconque atteinte à la vie.
Beaucoup de personnes restent perturbées, mais la répétition de tels gestes peut à la longue pousser d'autres à prendre cette voie sans plus se poser de questions.
Je reste désarçonné. Pourquoi? Oui, pourquoi? Finalement, je réponds: parce qu'il est contre-nature. Mais ce n'est pas qu'une idée, il est contre-ma-nature. Je suis personnellement atteint par ce geste, dans ma nature. Car Christian de Duve et moi-même avons une nature commune.
Autrement dit, à ce stade-ci, lorsqu'il est question des extrêmes de la vie humaine, conception et mort, il ne s'agit pas seulement d'un acte personnel, mais du mystère de la vie, qui nous englobe tous, qui nous concerne tous.
Car la conception et la mort touchent justement ces limites impénétrables qui nous échappent totalement.
Notre temps veut nier la nature humaine qui apparaît comme une contrainte. L'homme d'aujourd'hui veut se sentir libre, libéré de toute contrainte. Donc, pas de nature humaine ni de loi naturelle, seulement l'individu et son libre-arbitre, personnellement responsable de ses actes et donc dégagé de ses conditions naturelles. Loi naturelle, religion, Dieu... sont vus comme des obstacles à la liberté.
C'est dans cette logique que s'inscrivent sans doute le choix et le geste de Christian de Duve. L'homme se veut maître de sa destinée, ou de sa non-destinée.
Oui, le mystère de la vie, précisément en son commencement et en sa fin, nous échappe. Comment se fait-il que le phénomène biologique initial puisse ainsi déboucher sur une conscience, une conscience de soi, une personne? Mystère que la science est incapable d'expliquer. La mort nous échappe tout autant. La mort n'est pas un acte en soi, elle signe la fin de tout acte.
Comme chercheur éminent, Christian de Duve a beaucoup réfléchi. Il a été impresionné, émerveillé aussi. Mais cet émerveillement peut s'arrêter en deçà du mystère. Pourtant, le mystère est là, offert, donné. Mystère: chose cachée et pourtant se révélant. Parler de mystère n'entre pas en contradiction avec la science et avec la recherche. Au contraire. Mais le mystère se voile à celui qui prétend savoir et vouloir maîtriser. Dans ce cas, il réfute le mystère. Il le met à sa mesure. On a éliminé le mystère, et donc la vie.

lundi 6 mai 2013

La revue Bonne Nouvelle

Le n° 209 de la revue Bonne Nouvelle vient de paraître. A son sommaire:

- François, notre nouveau pape
Une unité déjà donnée, une interview de Thaddée Barnas, moine bénédictin de Chevetogne
- A quoi sert la presse chrétienne?, une opinion de Michel Kubler, religieux assomptionniste, ancien rédacteur religieux du journal La Croix
- Guérie par sainte Thérèse, le témoignage de la guérison qui conduit au procès de canonisation de la sainte de Lisieux
- Le don de la vie nous est confié, une réflexion de société du P. Vincent Leclerc, médecin et religieux assomptionniste français
- La présentation de ce livre récent: Rencontrer le Vivant, «Psychologie et spiritualité. Enjeux pastoraux», écrit par Dominique Struyf et Bernard Pottier.
- Les charismes au quotidien. A quoi servent les charismes?, réflexion éclairée du P. Jean Meeûs, s.j.
- Nourriture et toit, une médiation de l'évangile de la fête du Corps et du Sang du Christ.