Un
mot d’abord, pour ceux à qui le nom de Madeleine Delbrêl ne dit rien(1).
Née en 1904 dans une famille de libres-penseurs, sa jeunesse et son adolescence
ont été bercés par le « Dieu est mort » proféré par Nietzsche quelques
années plus tôt. Mais, peut-être grâce à la découverte de ce que Dieu n’était
pas une nécessité pour sa vie, elle s’est lancée, très vite, dans une quête des
autres qui la conduiront jusqu’au Tout-autre.
Après
sa conversion à la foi catholique et des études d’assistante sociale, elle
s’établit, en 1933, à Ivry, banlieue parisienne déchristianisée et acquise aux
communistes. Elle y vécut jusqu’à sa mort, en 1964, partageant son logis, une
maison ouverte à tous, avec une petite communauté de femmes.
Madeleine
sut témoigner de l’Évangile dans le compagnonnage avec les hommes, avant tout
par sa vie. Elle avait compris que derrière l’athéisme se cachent bien des
fautes des chrétiens, souvent prompts à annoncer un Dieu qui soit en opposition
avec les autres, plutôt qu’une vérité qui ne peut jamais se donner sans
l’autre, du moment qu’elle coïncide, en dernière instance, avec la charité.
Écoutons
Madeleine :
« Il y a une grâce de
l’hospitalité. Nous voudrions retrouver sa fraîcheur, telle que la connurent et
la vécurent les premières communautés chrétiennes.
L’hospitalité, c’est que les
autres soient chez eux chez nous. Aux repas, ils sont attendus quand ils ne
sont pas invités. Notre toit est le leur. Leur entrée dans notre vie engage
leur entrée dans notre maison.
Ce qui est dans notre maison
est à eux quand ils n’en n’ont pas l’équivalent. Ils y sont préférés à
nous-mêmes. L’hôte n’est pas traité selon la justice, mais selon l’amour. Il ne
peut pas être jugé, mais estimé dans la miséricorde.
De lui et de nous, l’obligé
c’est nous, car peu de mystères évangéliques sont plus riches que
l’hospitalité. En lui, nous recevons Jésus dans une sorte de communion
collective ; par lui, nous revivons Jésus qui a accompli dans sa vie la
loi juive et orientale de l’accueil ; par lui, nous avons l’occasion
d’obéir à des préceptes chargés de promesses.
‘Là où plusieurs sont
rassemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux’.
Vivre en communauté, c’est
exploiter pour le monde une sorte de sacrement. C’est assurer la présence de
Jésus.
Le témoignage d’un seul,
qu’il le veuille ou non, porte sa propre signature. Le témoignage d’une
communauté porte, si elle est fidèle, la signature du Christ »(2).
À
méditer par ceux qui ont la nostalgie d’une « chrétienté »
aujourd’hui disparue. Il y a du « pain sur la planche »...
(1) Je m’inspire du texte
consacré à Madeleine dans Témoins de Dieu. Martyrologe universel, publié
par la Communauté de Bose. Edition française chez Bayard, 2005. On trouve
également une brève notice sur Wikipédia.
(2) Madeleine Delbrêl, Communautés
selon l’Évangile.